Le 1er octobre 2023, le gouvernement des Pays-Bas décidait d’adopter une politique plus sévère que celle de la Commission européenne vis à vis de la législation des cigarettes électroniques en instaurant l’interdiction des arômes autres que classics, c’est-à-dire avec un goût tabac. Une mesure entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Son objectif : faire tomber le pays sous la barre des 5 % de fumeurs avant 2040.
Plus d’un an s’est écoulé depuis. Suffisamment de temps pour commencer à mesurer l’impact de cette loi sur la vape néerlandaise. Les premiers résultats attestent non seulement d’une baisse de la consommation de cigarettes électroniques, mais aussi d’un arrêt total pour de nombreux vapoteurs. Pourtant, les Pays-Bas ne comptent pas s’arrêter là.
Coup d’œil.
Pays-Bas : déjà plus d’un an d’interdiction des arômes
Accusés de donner à l’aérosol des cigarettes électroniques un goût attrayant pour les non-fumeurs, les arômes qui s’éloignent du goût du tabac, et plus particulièrement les arômes sucrés, ont fini par être bannis chez nos voisins néerlandais. L’interdiction des arômes fut en effet décidée par le gouvernement des Pays-Bas le 1er octobre 2023, et entra en vigueur le 1er janvier 2024, il y a plus d’un an déjà. Depuis ce jour, en Hollande, tous les e-liquides et concentrés pour le DIY aromatisés avec une saveur autre que classic, c’est-à-dire goût tabac, sont donc interdits.
Dans le cadre de cette loi, le gouvernement des Pays-Bas a dressé une liste de seulement 16 ingrédients autorisés pour fabriquer un arôme de tabac pour les e-liquides et les concentrés DIY pour e-cigarettes, et rendu les autres totalement illégaux. Par conséquent, tout produit du vapotage de type classic qui comporte un ou plusieurs de ces ingrédients hors-liste est également interdit dans le pays. Des professionnels du secteur de la vape avaient alors alerté sur l’impossibilité d’obtenir un arôme de tabac correct à partir de ces seuls ingrédients. La liste n’a toutefois pas été modifiée.
Pour aller plus loin : les 16 ingrédients autorisés pour préparer un arôme de tabac aux Pays-Bas
- 35044-68-9 beta-Damascone beta-Damascon
- 23726-91-2 (E)-beta-Damascone (E)-beta-Damascon
- 23726-92-3 (Z)-beta-Damascone (Z)-beta-Damascon
- 23696-85-7 Damascenone Damascenon
- 23726-93-4 (E)-beta-Damascenone (E)-beta-Damascenon
- 1125-21-9 Ketoisophorone Keto-isoforon
- 4883-60-7 2-Hydroxy-3,5,5- trimethyl-2- cyclohexenone 2-Hydroxy-3,5,5- trimethyl-2- cyclohexenon
- 536-78-7 3-Ethylpyridine 3-Ethylpyridine
- 350-03-8 3-Acetylpyridine 3-Acetylpyridine
- 91-10-1 2,6-Dimethoxyphenol 2,6-Dimethoxyfenol
- 67-47-0 5-(Hydroxymethyl)- 2-furfural 5-(Hydroxymethyl)- 2-furfural
- 591-12-8 alpha-Angelica lactone alfa-Angelica lacton
- 503-74-2 Isovaleric acid Isovaleriaanzuur
- 1139-30-6 (-)Caryophyllene oxide (-) Caryofylleen oxide
- 3738-00-9 Ambroxide Ambroxide
- 564-20-5 (3aR)-(+)-Sclareolide (3aR)-(+)-Sclareolide
L’interdiction des arômes aux Pays-Bas a entraîné une baisse d’utilisation des cigarettes électroniques
L’Institut national de la santé publique et de l’environnement néerlandais (RIVM) est un organisme qui a pour mission de réaliser de nombreuses recherches visant à maintenir la population du pays en bonne santé et à lui offrir un environnement de vie durable, sûr et sain. C’est donc naturellement lui qui a été chargé par le ministère de la Santé, du Bien-être et des Sports des Pays-Bas de mener une enquête sur les effets de l’interdiction des arômes des cigarettes électroniques sur leur utilisation par les vapoteurs néerlandais. Si le bilan final ne sera publié que plus tard cette année, le RIVM a toutefois d’ores-et-déjà communiqué les premiers résultats de ses recherches le 18 mars 2025.
Les chiffres sont préoccupants. Sur un total de plus de 1000 vapoteurs, dont 500 adolescents et jeunes adultes, et plus de 450 adultes, tous interrogés sur leur utilisation de produits du vapotage, 40 % des participants ont répondu avoir réduit leur utilisation de cigarettes électroniques depuis l’interdiction des arômes entrée en vigueur début janvier 2024. Parmi eux, on ne comptait pas davantage d’adolescents ou jeunes adultes que d’adultes.
Les prémices du rapport du RIVM précisent que la baisse de la consommation des cigarettes électroniques relevée aux Pays-Bas depuis janvier 2024 concerne autant l’utilisation quotidienne que celles hebdomadaire et mensuelle. Les chiffres attestent en effet d’une utilisation quotidienne diminuée de 29 % à 18 %, d’une utilisation hebdomadaire passée de 30 % à 14 %, et d’une utilisation mensuelle qui a chuté de 42 % à 16 %.
Moins de vapoteurs depuis l’interdiction des arômes aux Pays-Bas
Un autre chiffre ressort de l’enquête de l’institut national de la santé publique et de l’environnement des Pays-Bas : 22 % des vapoteurs néerlandais sondés ont pris une décision plus extrême que celle de réduire leur consommation de produits du vapotage. Ils ont en effet déclaré avoir tout bonnement arrêté d’utiliser une cigarette électronique à cause de l’interdiction des arômes autres que goût tabac en Hollande.
Le RIVM précise que ces anciens vapoteurs n’auraient pas adopté de substitut à la vape pour compenser leur arrêt du vapotage, sans évoquer de données précises. Leur publication partagée le 18 mars 2025 évoque simplement que l’institut s’est penché sur l’étude des effets indésirables de l’interdiction des arômes aux Pays-Bas, notamment l’achat via le marché illégal et le passage à d’autres produits nocifs. Il faudra donc vraisemblablement attendre la parution du rapport finalisé pour accéder à des chiffres détaillés.
L’Allemagne, nouvel eldorado des vapoteurs néerlandais
L’institut national de la santé publique et de l’environnement des Pays-Bas évoque un autre fait important dans cette publication, sans préciser de chiffres une fois de plus. Certains vapoteurs néerlandais, qui n’ont pas arrêté de vapoter suite à l’interdiction des arômes, ont décidé de s’approvisionner en saveurs illégales par le biais d’achats transfrontaliers. Le RIVM précise que les boutiques de vape en Allemagne ont été les plus sollicitées pour leur fournir ces produits. Là encore, il faudra attendre leur rapport final pour obtenir des données plus concrètes.
Cette annonce sert surtout à appuyer le bien-fondé de la demande effectuée par les Pays-Bas à la Commission européenne d’une interdiction des arômes à l’échelle de l’Union européenne, par une révision rapide de la TDP. Le rapport dit en effet mot pour mot :
« Selon les chercheurs, une interdiction générale des arômes dans l’Union européenne augmentera l’efficacité de l’interdiction, notamment parce que les achats transfrontaliers deviendront alors plus difficiles. »
Les Pays-Bas demandent une interdiction européenne des arômes par une révision rapide de la TPD, pour lutter contre les achats d’arômes transfrontaliers
La législation nationale des Pays-Bas qui interdit les arômes pour cigarettes électroniques autres que goût tabac ne suffit pas à elle seule à éradiquer la consommation de ces arômes. Il est en effet encore possible pour les néerlandais de contourner la loi en s’en procurant en boutique lors d’achats transfrontaliers, ou même en ligne. C’est pourquoi les Pays-Bas comptent sur l’appui de la Commission européenne pour rendre impossibles ces pratiques en interdisant ces mêmes arômes sur l’ensemble du territoire européen.
Bien décidé à ne pas accepter sans rien dire l’absence de la révision de la directive européenne sur les produits du tabac (TPD) au programme de travail 2025 de la Commission européenne, le Secrétaire d’Etat néerlandais à la Santé, au Bien-Être et aux Sports, chargé de la Jeunesse, de la Prévention et des Sports, Vincent Karremans, a donc adressé en mars 2025 une lettre à Olivér Várhelyi, le commissaire européen à la Santé et au Bien-être animal, pour lui faire part de son mécontentement. Dans cette lettre, il demande à la Commission européenne de suivre l’exemple des Pays-Bas et d’interdire les arômes à l’échelle européenne, pour ne pas nuire à l’interdiction nationale en vigueur dans son pays.
Une demande coercitive de plus, après une précédente lettre adressée à la Commission européenne en décembre 2024 qui demandait d’accélérer l’instauration d’une fiscalisation des produits du vapotage.
Un taux maximal de nicotine et un emballage neutre également demandés
Le Secrétaire d’Etat à la Santé, au Bien-Être et aux Sports néerlandais a également pressé la Commission européenne dans son courrier en date de mars 2025 de prendre d’autres mesures décisives, à savoir imposer des niveaux maximum de nicotine ainsi que des emballages neutres pour tous les nouveaux produits nicotinés, dont les produits du vapotage.
Les Pays-Bas envisagent de relever l’âge minimum pour l’achat de tout produit nicotiné de 18 à 21 ans
« Nous ne voulons pas que les jeunes soient exposés aux cigarettes électroniques ou à d’autres produits à base de nicotine, car ils risquent sinon une dépendance à la nicotine à vie et les dommages qui en découlent pour leur santé. »
Vincent Karremans, Secrétaire d’Etat néerlandais à la Santé, au Bien-Être et aux Sports, chargé de la Jeunesse, de la Prévention et des Sports
À l’échelle nationale aussi, les Pays-Bas envisagent de prendre davantage de mesures à l’encontre des cigarettes électroniques et, de manière plus large, des nouveaux produits nicotinés, mais aussi des produits du tabac, dans le cadre de leur plan visant à parvenir à une génération sans tabac et sans nicotine d’ici 2040. Le 12 mars 2025, le ministère de la Santé a en effet partagé une proposition de loi qui relèverait l’âge légal minimum permettant de se procurer légalement ces produits à 21 ans, contre 18 actuellement.
Vincent Karremans, Secrétaire d’Etat néerlandais à la Santé, au Bien-Être et aux Sports, chargé de la Jeunesse, de la Prévention et des Sports, a également déclaré, lors de l’annonce de cette proposition de loi, que le gouvernement compte investir 3 millions d’euros en 2025 pour lutter contre les cigarettes électroniques, à la fois dans une vaste campagne de communication visant à sensibiliser les parents aux dangers de la vape, et par une augmentation des ressources allouées aux forces de l’ordre pour lutter contre le commerce illégal des produits du vapotage.
Des amendes plus lourdes pour la vente illégale de cigarettes électroniques devraient être instaurées, et de nouveaux produits interdits, comme les embouts filtres aromatisés adaptables aux e-cigarettes. La proposition de loi néerlandaise prévoit également d’exiger la vente des produits du vapotage dans des emballages neutres, et de réduire le nombre de points de vente. Enfin, Vincent Karremans a déclaré lors de sa présentation que le gouvernement des Pays-Bas étudiera prochainement la possibilité d’introduire une taxe sur l’industrie du tabac pour financer des programmes de prévention et de santé publique.