Tabagisme & vapotage en France sont décryptés dans le nouveau rapport OFDT. L’Observatoire Français des Drogues et des Tendances addictives (OFDT) a en effet récemment publié un rapport de 20 pages qui fait le point sur l’évolution du marché du tabac dans ses composantes légales et illégales, sur les conséquences sociales et sanitaires de la consommation de cigarettes ainsi que sur les réponses publiques qui favorisent la sortie du tabagisme.
L’OFDT s’intéresse également dans ce document à l’évolution des comportements d’usages, notamment auprès de la jeune population, et s’intéresse de près à la perception de la cigarette et à sa consommation par les adolescents, ainsi que de la chicha et… de la cigarette électronique. Le vapotage est donc aussi passé au crible dans le rapport de l’OFDT, surtout à travers le prisme des jeunes. Par ici pour découvrir les tendances soulevées.
Rapport OFDT : la dangerosité perçue du tabagisme augmente chez les français, la consommation baisse
Le rapport OFDT témoigne d’une hausse de la dangerosité perçue du tabagisme pour la population française, toutes générations confondues. Près de 1 français sur 2 (49 %) considère ainsi désormais qu’essayer de fumer, ou fumer de temps en temps, est nocif et dangereux pour la santé. Ils n’étaient que 22 % il y a 20 ans. Cependant, les fumeurs sont ceux qui considèrent le moins que le tabac est dangereux dès l’expérimentation. Heureusement tout de même, ils sont plus nombreux que les non-fumeurs à le considérer nocif dès une consommation quotidienne (56 % contre 49 %).
Une évolution de perception qu’on ne peut que saluer. Il faut dire qu’avec environ 13 % de la mortalité en 2015, soit 75320 décès sur les 580000 décès français de l’année, les dangers du tabac sont plus que réels : ils sont dramatiques. Et si la part des décès liés au tabagisme touchant les hommes tend à baisser, celle des femmes croît encore de + 5 % par an en moyenne. Les femmes françaises sont aussi encore 25 % à fumer quotidiennement pendant leur grossesse, ce qui fait de la France le 7ème pays d’Europe de l’Ouest le plus touché par ce problème.
Autrement dit : l’impact du tabagisme est encore considérable sur la situation sanitaire de la France, même si le changement de perception a entraîné une baisse du tabagisme quotidien des français. Les ventes de tabac ont enregistré une baisse considérable : – 6,9 % pour les cigarettes et – 8,4% pour le tabac à rouler, malgré une augmentation de la vente des autres produits du tabac, notamment le tabac à chauffer et la chicha, de 4,8 %. Le tabagisme quotidien concernait ainsi encore 26 % des 18-75 ans en 2020, avec une consommation moyenne de 13 cigarettes par jour. Le bilan dressé est donc encourageant mais loin d’être satisfaisant.
Les traitements pour l’arrêt du tabac ont le vent en poupe
Tabagisme, vapotage : le rapport OFDT s’est penché sur les autres effets de l’évolution de la perception de la cigarette par les consommateurs. La hausse des représentations péjoratives du tabagisme a eu pour conséquence l’augmentation bénéfique des tentatives de sevrage tabagique d’au moins une semaine dès 2019 (33 % contre 25 % auparavant). Le rapport de l’OFDT ne mentionne cependant pas si le nombre de tentatives à l’aide de la cigarette électronique a augmenté. L’Observatoire Français des Drogues et des Tendances addictives rappelle en effet que le Haut Conseil de santé publique (HCSP) a actualisé son avis relatif aux bénéfices-risques de la cigarette électronique le 26 novembre 2021, en demandant aux professionnels de santé de ne plus proposer le vapotage comme aide au sevrage tabagique, à défaut d’un consensus scientifique sur son efficacité et son innocuité sous cet usage.
En apprendre plus sur l’avis du HCSP.
L’OFDT a par conséquent focalisé son étude statistique sur les ventes de traitements d’aide à l’arrêt du tabac. L’organisme a constaté une hausse des ventes de traitements nicotiniques de substitution (TNS) de + 14,4 % entre 2020 et 2021. Cette hausse des ventes concerne majoritairement les substituts sous forme orale, produits les plus vendus, avec une progression de 21,3 % entre 2020 et 2021. Des substituts de plus en plus prescrits en combinaison avec les patchs, conformément aux recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS). La disparition du forfait TNS au 1er janvier 2019, pour inciter les fumeurs à quitter le tabac par un meilleur remboursement, est évoquée comme une autre cause probable de cette augmentation.
Rapport OFDT : forte défiance des jeunes pour le tabagisme & baisse de consommation
Le rapport OFDT s’est aussi penché sur le tabagisme et le vapotage des jeunes. Grâce à la Journée défense et citoyenneté (anciennement Appel de préparation à la défense) à laquelle doivent participer tous les adolescents français, l’OFDT a en effet pu récolter des données sur leurs usages du tabac via une enquête sur la santé et les consommations (ESCAPAD). Des données qui furent complétées par celles de deux autres enquêtes réalisées par l’OFDT également : l’European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs 2019 (ESPAD) et l’Enquête nationale en collège et en lycée chez les adolescents sur la santé et les substances (EnCLASS) réalisée en 2021 auprès d’élèves scolarisés en classe de 3ème.
Leurs résultats concordent : la défiance des jeunes pour le tabagisme semble encore plus forte chez les mineurs que chez les adultes, et le tabagisme auprès de cette tranche de population diminue en conséquence. Une baisse que l’OFDT rapproche aussi de l’efficacité des politiques sanitaires, telles que l’interdiction de vente aux mineurs, l’interdiction de fumer dans les lieux publics et la hausse des prix des paquets de cigarettes. La vape pourrait-elle elle-aussi avoir un lien avec la baisse du tabagisme chez les adolescents français ? L’OFDT n’en dit pas un mot.
Si la baisse du tabagisme observée chez les jeunes a commencé en 2002, elle décroît de manière très considérable depuis 2010. L’enquête EnCLASS 3e menée en 2021 révèle en effet que les adolescents qui fument quotidiennement étaient 4 fois moins nombreux en 2021 qu’en 2010 (3,7 % contre 15,6 %). Du côté des adolescents « expérimentateurs », qui ont décidé d’essayer la cigarette, une diminution notable se remarque aussi. Ils étaient en effet 51,8 % à avoir pris une cigarette en 2010 pour essayer, contre 29,1 % en 2021. Une baisse de presque 23 points en 11 ans !
L’OFDT a également relevé un recul de l’âge moyen d’expérimentation du tabac chez les adolescents français entre 2000 et 2017, de neuf mois exactement, passant de 13,7 ans à 14,4 ans. Seul bémol à ce tableau assez positif : la dépendance arrive plus vite qu’auparavant pour ces jeunes fumeurs, puisqu’ils deviennent fumeurs quotidiens en 13 mois, contre 22 mois il y a 10 ans. Un point de vigilance a également été fait par l’OFDT dans son rapport sur le tabagisme en 2021 en France : l’expérimentation de la chicha seule existe désormais pour une part notable de jeunes (6 % entre 2018 et 2021). En est-il de même pour le vapotage ?
Rapport OFDT : le vapotage, encore rare chez les adolescents, mais en hausse
Après le tabagisme, le rapport OFDT scrute de plus près le vapotage chez les jeunes. Les Enquêtes ESCAPAD, ESPAD et EnCLASS ont en effet permis à l’ODFT de récolter des données sur la vape des adolescents. Son rapport annuel évoque « un usage de plus en plus populaire chez les adolescents de la cigarette électronique, qui s’autonomise du tabac classique (sous forme de cigarettes manufacturées ou roulées) ». Une tendance rapidement tempérée par l’organisme lui-même, qui rappelle que « L’usage quotidien de la cigarette électronique (2,8 %) reste toutefois relativement rare ». Autrement dit : 97,2 % des adolescents français ne vapotent pas. On se demande bien où est l’épidémie de vapotage crainte par certaines autorités de santé, qui crient à qui veut l’entendre que certains arômes sont pour nos jeunes la tentation incarnée !
Malgré cet usage très rare, le vapotage augmente quand même chez nos ados depuis 2015, en tout cas chez les lycéens, avec une expérimentation augmentée de + 17 points entre 2015 et 2018 (passant de 35,1% à 52,1%), et une stabilité de la vape chez les collégiens entre 2018 et 2021, contrairement au tabagisme qui est en baisse.
Une expérimentation du vapotage qui se dissocie du tabagisme
Le rapport de l’OFDT révèle d’ailleurs que plus de lycéens s’essayent désormais au vapotage sans jamais avoir fumé une cigarette auparavant (3,7 % en 2015 contre 9,8 % en 2018 puis 8 % en 2021), voire vapotent quotidiennement sans avoir jamais fumé avant (2,7 % en 2015 contre 5,6 % en 2018). Ainsi, si encore 1 élève sur 4 environ a déjà fumé du tabac et utilisé une cigarette électronique, ils sont de plus en plus nombreux à expérimenter exclusivement la vape, dissociée de la cigarette classique. L’écart d’expérimentation se réduit d’ailleurs entre la cigarette électronique et le tabac en 2021 (34,2 % contre 35,1 %).
Faut-il s’en alarmer ? Pas pour le moment : l’expérimentation du tabagisme, conjointement ou non à la cigarette électronique, est en baisse (43,6% en 2018 contre 35,1 % en 2021) malgré la hausse d’expérimentation du vapotage. Aucun effet passerelle n’est donc observable. Cependant, bien que le vapotage soit bien moins dangereux que le tabac, il serait préférable que nos chères têtes blondes ne commencent à pratiquer ni l’un ni l’autre, pour ne jamais risquer de dépendance à quelque produit que ce soit. L’exemple des États-Unis peut rassurer quelque peu toutefois, le vapotage ayant permis de voir apparaître sur le sol américain la première génération sans tabac, avant de lui-même diminuer progressivement et fortement chez les lycéens. Il est donc probable que le vapotage dans les lycées de France prenne le même chemin.
Vous avez raté le scoop de l’émergence d’une génération sans tabac aux USA ? Par ici !
Rapport OFDT : un vapotage quotidien stabilisé chez les adultes français
Du côté des adultes, la cigarette électronique connaît également un attrait grandissant. Le rapport OFDT sur le tabagisme et le vapotage en 2021 en France mentionne en effet des chiffres provenant du dernier Baromètre santé de Santé publique France, traduisant une hausse d’utilisation entre 2019 et 2020. Cette année-là, 37,4 % des 18-75 ans expérimentaient la cigarette électronique, et 5,4 % d’entre eux l’utilisaient encore récemment. Toutefois, les adeptes de la vape quotidienne sont eux stables depuis 2019. Ils représentaient seulement 4,3 % des adultes en 2020.
Vous savez à présent tout des évolutions de consommation et du marché du tabac relevées par l’OFDT dans son rapport sur le tabagisme et le vapotage en France en 2021. Si la vigilance sur les produits véhiculant une image plus positive que le tabac auprès des jeunes reste de mise pour l’OFDT, seul l’avenir dira ce qu’il en est.