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La France tente d’interdire les arômes via le Conseil Européen

La France tente d'interdire les arômes via le Conseil Européen

Le 21 juin dernier, des représentants des ministères de la Santé de tous les pays membres de l’UE se sont réunis dans le cadre d’un conseil EPSCO informel au sein du Conseil Européen à l’occasion de la réunion « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs », dont Cyril Piquemal pour la France, étant son représentant permanent adjoint auprès de l’Union européenne.

Lors de cette réunion, une proposition d’interdiction des arômes pour cigarettes électroniques fut présentée, initiée par le Danemark, et co-signée par la France ainsi que l’Allemagne, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, l’Irlande, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne et la Slovénie. Autrement dit : la France tente d’interdire les arômes via le Conseil Européen. Coup d’œil.


Comme 11 autres États membres de l’UE, la France déplore une législation européenne des produits nicotinés insuffisante

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Le vendredi 14 juin 2024, en période d’élections européennes, le Danemark a décidé de porter à l’attention du Conseil Européen l’insuffisance de l’actuelle législation européenne qui encadre les produits du tabac et les autres produits nicotinés, dont les produits du vapotage. Ceci à travers un document d’appel à l’action nommé « Renforcer les efforts pour protéger les enfants du marketing direct et de la vente des produits du tabac et de la nicotine, notamment sur les plateformes numériques – Informations de la délégation danoise au nom des Danois, Estoniens, Finnois, Français, Allemands, Irlandais, Luxembourgeois, Maltais, Néerlandais, Polonais, Slovènes et Espagnols ».

Selon le gouvernement danois, elle ne permettrait pas, en l’état actuel, de protéger les enfants et les adolescents européens de l’addiction à la nicotine, qui constituerait une porte d’entrée vers le tabagisme, parce qu’elle n’est pas assez dure pour prendre le dessus sur les cadres juridiques nationaux laxistes de certains États membres. Des cadres qui rendent ces produits disponibles via Internet même dans les pays qui luttent actuellement pour freiner leur accessibilité auprès des plus jeunes.

« Ces dernières années, le choix de produits à base de tabac et de nicotine a augmenté de façon exponentielle et beaucoup sont explicitement commercialisés pour plaire aux enfants et aux adolescents – par exemple avec des saveurs de pastèque, fraise, gomme, chocolat, etc. […] Une substance hautement addictive comme la nicotine, qui présente un danger pour la santé, fait l’objet d’une promotion agressive auprès de nos enfants. Cette tactique fonctionne. […] Un rapport publié récemment montre que le nombre d’enfants et de jeunes initiés à la nicotine est en augmentation, tout comme la consommation d’une large gamme de produits à base de tabac et de nicotine. Nous sommes très préoccupés par l’évolution que nous constatons dans la commercialisation et la vente de nouveaux produits du tabac ou à base de nicotine. De nombreux États membres ont déjà pris des mesures pour réglementer ces produits pour les rendre moins attrayants, et moins accessibles aux enfants, au niveau national, pour lutter contre cette augmentation. Mais ces produits sont encore facilement accessibles sur Internet et depuis les pays qui n’ont pas développé pour eux un cadre juridique. Nous avons besoin d’une solution européenne ambitieuse si nous voulons résoudre ce problème de manière efficace. »

Une opinion partagée par 11 autres États membres de l’U.E : l’Allemagne, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, l’Irlande, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, la Slovénie et… la France. Emmanuel Macron a en effet signé le document initié par le Danemark le 17 juin 2024, malgré que ce dernier ne soit étayé que par des études danoises dont les résultats ne sont pas nécessairement applicables aux autres pays de l’Union Européenne.

La France tente d’interdire les arômes via le Conseil Européen, en exerçant sur lui une pression

La France tente d'interdire les arômes via le Conseil Européen, en exerçant sur lui une pression

Le document signé par 11 États membres de l’Union Européenne ne fait pas qu’énumérer les problèmes repérés. Il demande aussi au Conseil Européen de passer à l’action, et fournit pour cela des recommandations.

« Les initiatives devraient inclure une interdiction des arômes dans les produits à base de nicotine, une limite sur la nicotine contenu dans ces produits et, le cas échéant, une interdiction de certains produits. […] Nous demandons à la Commission européenne d’agir et de présenter des propositions dans les plus brefs délais pour nous aider à protéger les enfants et les jeunes des effets nocifs du tabac et des produits à base de nicotine. Plus généralement, nous appelons la Commission à engager un débat sur les produits à base de nicotine, et à examiner l’éventail des réglementations possibles qui pourraient permettre aux États membres d’interdire des catégories de produits définies également. »

Ainsi, la France tente d’interdire les arômes de certains e-liquides pour cigarettes électroniques dans le cadre d’une coalition, et se révèle aussi favorable à une limitation de la teneur en nicotine des e-liquides. Deux propositions de durcissement de loi qui ont été présentées au Conseil Européen le 21 juin dernier dans le cadre de la réunion « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » d’un conseil EPSCO informel des ministres de la Santé européens. Ce faisant, la coalition des 11 États membres signataires fait pression sur le Conseil Européen avant même que la Commission européenne ne lance la révision de sa directive sur les produits du tabac (TPD).

Une seconde demande d’appel à l’action déposée par la Lettonie

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Le document d’appel à l’action à l’initiative du Danemark n’est pas le seul à avoir été adressé au Conseil Européen, puisque la Lettonie a également adressé au préalable ses propres observations et recommandations à travers un document nommé « Appel à l’action pour protéger les jeunes contre les dommages causés par les nouveaux produits du tabac et de la nicotine », co-signé par Chypre, l’Espagne, l’Estonie, l’Irlande, la Finlande, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, le Portugal et la Slovénie.

Il pointe lui aussi du doigt les disparités des réglementations des États membres au sujet de l’encadrement des nouveaux produits nicotinés, dont les cigarettes électroniques et les e-liquides, et appelle à une harmonisation via la réglementation européenne. Comprenez par là un durcissement qui obligerait les pays les moins prohibitifs vis à vis de la vape à le devenir davantage. Autrement dit, ce document ressemble beaucoup à celui lancé par le Danemark, à un détail près : il attire davantage l’attention du Conseil Européen sur l’accessibilité problématique de ces produits pour les jeunes via Internet et les réseaux sociaux.

« La disponibilité des nouveaux produits nicotinés et des produits du tabac pour les enfants et les jeunes est facilitée par la possibilité de commander ces produits sur internet ainsi que de les commercialiser sur les réseaux sociaux (Instagram, Facebook) ou des plateformes de communication (Telegram). »

Un risque d’infléchir la ligne directrice de la future TPD

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Alors qu’aucun débat public au sujet de la réglementation des produits du vapotage n’a encore officiellement démarré dans le cadre de la révision de la TPD, la présentation des documents initiés par le Danemark et la Lettonie lors de la réunion « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » du conseil EPSCO informel des ministres de la Santé européens ressemble à une tentative de prendre de court les nouveaux élus européens, en court-circuitant les processus d’évaluation d’impact habituels, et d’influencer le Conseil Européen pour infléchir ce débat. Car si le Conseil Européen n’a aucun pouvoir décisionnaire et ne peut de lui-même durcir cette directive européenne, il possède par contre une influence non négligeable sur la Commission Européenne. Un levier anti vape vient donc de s’enclencher, actionné par 12 États membres, dont la France.

Il ne serait malheureusement pas étonnant, suite à l’étude de ces documents, que le Conseil Européen décide de faire pression sur la Commission Européenne pour forcer un débat sur l’interdiction des arômes dans les produits du vapotage et la limitation de la nicotine dans ces derniers, voire imposer l’adoption de ces recommandations. Car c’est le Danemark qui succédera à la Pologne et occupera la présidence du Conseil Européen en 2025, au moment de la prochaine COP de la Convention-cadre pour la lutte antitabac. Or, si une majorité des 27 dirigeants des pays membres décide de se ranger à l’avis du Danemark, le Conseil Européen pourra donner mandat à la Commission Européenne pour imposer l’interdiction des arômes dans le projet de révision de la directive sur les produits du tabac (TPD) qu’elle devra soumettre au Parlement européen.

Pourquoi de tels appels à l’action ?

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Au delà des raisons évoquées dans les documents fournis, Philippe Poirson, l’un des administrateurs de l’association SOVAPE, en aperçoit d’autres qu’il énonce dans un article. La première d’entre elles est financière. Car parmi les pays signataires, certains comme l’Allemagne et la Pologne comptent parmi les principaux producteurs de cigarettes dans le monde, quand d’autres, comme le Luxembourg, tirent de sacrés bénéfices des ventes transfrontalières et nationales des produits du tabac.

Philippe Poirson évoque l’impact qu’aurait une interdiction de certains arômes d’e-liquides pour cigarettes électroniques pour la France, en projetant sur l’hexagone l’exemple québécois effrayant, avec 30 à 40% de vapoteurs qui sont retournés au tabagisme. Dans une telle situation, près de trois milliards d’euros par an pourraient tomber en plus dans les caisses de l’état français, après avoir obtenu quatre milliards d’euros de revenus fiscaux annuels supplémentaires depuis 2019 rien que par une prise de position anti réduction des risques tabagiques qui a freiné la chute de la consommation de tabac dans le pays.

SOVAPE demande au Conseil Européen de rejeter l’interdiction des arômes

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L’association SOVAPE n’a pas tardé à réagir aux appels à l’action adressés au Conseil Européen par le Danemark et la Lettonie et l’ensemble des pays signataires, en demandant au Conseil Européen de rejeter leurs recommandations pour protéger des millions d’européens, vapoteurs. Une requête argumentée pour sa part par les résultats de l’enquête Merci la Vape menée en 2023 auprès de près de 40 000 vapoteurs en France, qui a révélé que pour 88 % des vapoteurs ayant cessé de fumer, la diversité des arômes a été un élément important ou très important pour leur arrêt tabagique. SOVAPE a plus précisément déclaré :

« Pour imposer de nouvelles réglementations au niveau de l’UE, une évaluation et une analyse d’impact appropriées sont nécessaires. L’analyse d’impact (AI) fournit des informations cruciales aux décideurs sur l’opportunité et la manière de réglementer pour atteindre les objectifs des politiques publiques. Les politiques de santé doivent être conçues sur des analyses rationnelles et non des réactions émotives exacerbées par des données biaisées. »

« Des mesures immédiates et plus strictes sans évaluation appropriée ont été déjà été rejetées par l’ensemble des États membres lors des négociations précédant la conférence des parties à la CCLAT (COP 10) tenue en octobre dernier. »

« La réglementation des arômes relève de la compétence des États membres et non de la Commission européenne et les États membres peuvent d’ores et déjà adopter et appliquer des règles sur l’accès des mineurs sans attendre l’UE. »

« Cinq ans après l’entrée en vigueur de la TPD, le rapport d’application 2021 a examiné les progrès réalisés jusqu’à présent et a décrit les forces et les faiblesses de la directive, tout en indiquant les éléments nécessitant une adaptation. L’absence de problèmes de mise en œuvre, comme l’indique le rapport, et le nombre limité d’actes délégués adoptés par la Commission depuis 2014 prouvent que la TPD est un exemple de législation du marché unique qui fonctionne bien. Il n’y a pas lieu d’ouvrir sa révision. »


Les arômes des produits du vapotage sont-ils si problématiques ?

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En guise de conclusion, une question : les arômes des produits du vapotage sont-ils aussi problématiques que ce qu’en disent le Danemark et l’ensemble des pays signataires en faveur de leur interdiction ? Pas si on en croit la science et les professionnels de terrain qui accompagnent les fumeurs. Non seulement l’effet passerelle de la vape vers le tabagisme n’a pas pu être démontré de manière fiable en raison d’études biaisées qui ont été démontées par des spécialistes, mais surtout, les arômes incriminés sont un facteur essentiel de réussite des sevrages tabagiques, comme le rappelle le Docteur Anne Borgne, tabacologue, pour Oneshot Media.

« Je l’observe au quotidien : ce sont justement ces arômes “sucrés” qui aident le mieux mes patients. Quant aux jeunes, qu’on ne s’y trompe pas : peu importe l’interdiction des arômes, cela ne les empêchera pas de vapoter. En revanche, cela pourrait les inciter à (re)fumer. Et c’est cela qu’il faut craindre ! »

Aussi, si ce n’est pas déjà fait, rendez vous sur jesuisvapoteur.org. Vous pourrez apporter votre pierre à l’édifice pour défendre vos arômes, plus que jamais menacés !

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